Dans la lignée des articles sur Tiro Federal, Racing Club Avellaneda, j’ai choisi aujourd’hui de vous faire découvrir la stratégie de développement international d’Avai Futebol Club.
Avai est un club multisports brésilien, situé à Florianópolis, ville de l’Etat de Santa Catarina, qui évolue depuis 3 ans en Série A (1re Division du football brésilien). Le Lion de l’île, comme on le surnomme [1], a d’ailleurs participé pour la première fois à la Copa Sudamericana en 2010.
Afin d’en savoir plus, j’ai pris contact avec Misaki Tsuruta, responsable du développement international du club.
La situation d’Avai
Il convient dans un premier temps de présenter Avai afin de mieux comprendre le challenge que représente le développement du club à l’international.
J’ai pu découvrir en préparant notre entretien, qu’Avai a réalisé en 2008 un film spécial « Vamos subir Leão » pour fêter l’accession du club en Série A. Le club a également crée en 2006 une radio officielle sur internet, alors qu’il évoluait en 2e division. Cette radio, la “Radio Avai”, devrait être relancée en 2012 en complément d’une chaîne TV. Côté supporter, le club compte actuellement plus de 10.000 socios, ce qui fait de lui le plus grand club de l’état de Santa Catarina, et il espère passer le cap des 20.000 socios en 2012.
Une autre spécificité qui a retenu mon attention, est liée à son maillot. En 2009, Avai a créé une joint-venture avec une entreprise spécialisée dans la distribution d’articles sportifs, Pieri Sport, qui a donné le jour à la marque Fanatic, ce qui permet au club de produire ses propres maillots. Ce format offre une plus grande flexibilité au club et lui permet d’être plus réactif [2]. Avec cette marque, Avai et Pieri Sport ne se limitent pas à la création de maillot pour Avai, l’objectif de Fanatic est de permettre aux deux organisations de grandir conjointement. Dans ce sens, Fanatic fournit aujourd’hui des maillots à d’autres équipes, ce qui permet à Avai d’obtenir une nouvelle source de revenus grâce aux ventes de maillots de ces clubs.
Les challenges du développement international, le rôle de Misaki
Misaki est arrivée à Avai, il y a un an et demi, afin d’aider le club à se structurer et pouvoir envisager une présence à long terme en série A.
Quatre domaines ont été confiés à Misaki afin de développer le club à l’international.
Le premier domaine est la création d’un réseau avec des clubs étrangers afin d’offrir une plus grande visibilité aux joueurs du club. Comme dans la très grande majorité des clubs de football, et encore plus en Amérique latine, la vente de joueurs constitue la plus grande source de revenus pour Avai.
Dans ce sens Misaki travaille étroitement avec la direction sportive du club, afin d’établir des profils pour chaque joueur (statistiques, évolution), ce qui permet aux clubs potentiellement intéressés d’obtenir un maximum d’informations sur les joueurs du club.
Afin de construire un réseau puissant auprès de clubs étrangers, la stratégie mise en place par Avai a été de se rapprocher de clubs de championnats “moyens”. Car les plus belles promesses du football brésilien qui sont directement vendus à des clubs “majeurs”, se trouvent dans des clubs phares brésiliens comme Flamengo, Santos ou encore les Corinthians. Ainsi Misaki se concentre donc sur des championnats plus modestes comme celui du Portugal, la Belgique, les pays scandinaves, la Russie, la Corée du sud, la Chine, le Japon qui pourraient être intéressés par les joueurs du club.
Misaki m’a d’ailleurs commenté qu’Avai est déjà très proche de clubs comme le FC Porto, spécialiste en détection de promesse sud-américaines inaperçues. Avai a également mis en place un partenariat avec un club argentin, Santa Fe Futbol Club, dans le but de réaliser des échanges de jeunes joueurs et d’entraîneurs.
En se rapprochant des clubs européens et asiatiques, Avai est plus en mesure de connaitre leurs nécessités, et donc de proposer les joueurs correspondant au profil recherché.
Une autre initiative mise en place dans ce domaine consiste en des échanges avec des clubs formateurs. Avai cherche également à se rapprocher de clubs européens de championnats “majeurs”, réputés pour la qualité de leur centre de formation, afin, dans un premier temps, de parfaire la formation des plus belles promesses du club pour les intégrer par la suite dans l’équipe une d’Avai, et, dans un second temps, leur offrir une meilleure visibilité et les préparer au style de jeu européen afin de les vendre dans un délai de 3 à 4 ans [3]. Dans ce sens, Avai est sur le point d’annoncer un accord avec un club de série A italien ; deux jeunes joueurs du club devraient être prêtés 3 mois (avec possibilité de prolongation), afin d’évoluer dans le championnat des moins de 20 ans “Primavera”. Misaki m’a expliqué que cette politique d’échange est en partie due au faible niveau des championnats juniors dans la région de Santa Catarina, en comparaison des championnats de Sao Paulo et de Rio de Janeiro.
Le deuxième domaine, est le développement de la notoriété d’Avai dans la presse étrangère.
A la différence de clubs comme Flamengo, Corinthians, Avai n’est pas connu en dehors du Brésil. Afin de développer la notoriété du club à l’étranger, Misaki se met en relation avec des médias tels que des blogs, des sites d’informations sportives des pays identifiés pour proposer les joueurs du club. Ainsi il s’est rapproché des médias portugais. De par leur langue commune, le Portugal est un pays fondamental pour le développement du club.
De par leur langue commune, le Portugal est un pays fondamental pour le développement du club. Avai va d’ailleurs organiser, avec un club portugais, un tournoi de jeu sur PlayStation 3 en Septembre [4].
Ces actions lui permettent notamment de booster la réputation du programme de stage pour joueurs étrangers, qui est le troisième domaine d’action de Misaki.
Avai a mis en place un programme qui a pour but d’aider des jeunes joueurs étrangers à se perfectionner (techniquement et physiquement). Les jeunes participants à ce programme sont essentiellement des joueurs de 15 à 19 ans qui n’évoluent pas dans les plus grands clubs de leurs pays.
Il est d’une durée d’1 à 3 mois (le stage coûte 2300 euros par mois), lors duquel les jeunes joueurs étrangers côtoient les juniors d’Avai. Le programme comporte hébergement spécial avec Internet, évaluation hebdomadaire, plan de développement personnalisé, mentoring avec un joueur professionnel, cours de portugais, voyage avec la commission technique aux matchs extérieurs, stage dans la partie administrative du club (marketing, finance…), visites d’hôpitaux et d’orphelinats, ainsi que divers excursions.
En 2010, Avai a reçu 5 joueurs. Les pays visés par ce programme sont essentiellement la Chine, les États-Unis, l’Australie, le Qatar, la Corée du Sud ou encore le Japon.
Il est possible pour certains de ces jeunes joueurs de signer un contrat pro avec Avai. Ce fut notamment le cas lorsque le club évoluait en 3e division, mais c’est aujourd’hui plus compliqué car le club évolue en 1re division.
Enfin, le quatrième domaine d’activité de Misaki, est le rapprochement du club auprès d’entreprises afin de permettre la mise en place de nouveaux projets.
Avai travaille actuellement sur la construction d’un nouveau centre d’entrainement (coût estimé à 3,8 Millions d’euros) avec hébergement pour 120 athlètes, piscine et soins dentaires pour les joueurs et les communautés défavorisées de Florianópolis. Ce projet dispose de la reconnaissance du ministère des sports, ce qui offre à Avai un argument de poids auprès d’éventuels sponsors.
En effet, au Brésil, grâce à une loi encouragent le sport, la « lei de incentivo ao Esporte », les entreprises nationales et étrangères peuvent dédier 1% de leurs impôts à des projets reconnus par le ministère des sports. Misaki m’a confié durant notre entretien que ce centre d’entrainement devrait recevoir 2 sélections lors de la coupe du monde, ce qui lui donne un autre argument au moment de présenter le projet à des directeurs marketing d’entreprises étrangères.
En plus du centre de formation, Avai travaille également sur la création d’un musée au sein de son stade. Ce projet est pour l’instant au stade du diagnostic, mais Misaki estime qu’il devrait être prêt pour 2014. Avai pourra d’ailleurs profiter d’une autre loi brésilienne, la « Lei Rouanet » car ce musée a été reconnu par le ministère de la culture, ce qui permettra au club de proposer aux entreprises d’investir 4% de leurs impôts à la construction du musée.
Quels résultats ?
Grâce à ces actions, Avai a pu organiser une tournée avec son équipe B dans les pays scandinaves où ils ont joué 4 matchs amicaux contre des clubs comme Brøndby, Helsingborgs [5]. Cette tournée a permis à Avai de se rapprocher encore plus des différents directeurs de clubs, d’apprendre des méthodes européennes, et également d’être cité dans la presse scandinave. Afin d’aller encore plus loin dans ses initiatives, Misaki espère à terme constituer un réseau puissant avec 20 clubs dans le monde.
Côté institutionnel, Avai a récemment établi un accord avec Molten, une entreprise Japonaise, actuel sponsor de la FIBA (à vérifier), également présente dans le volley. Ce partenariat est très important pour Avai, car une des difficultés pour le club consiste en l’obtention de matériel pour que les 150 jeunes du club s’entrainent dans des conditions optimales. Ainsi, Molten fournit à toutes les équipes du club des ballons et des gants pour les gardiens de but. Pour Molten, ce partenariat fait partie d’un plan d’action de la marque qui souhaite développer sa présence dans le marché brésilien, lequel bénéficie d’une excellente exposition avec la coupe du monde 2014 et les JO 2016.
De façon plus globale, le club a pu se structurer considérablement et comprendre l’importance de la planification. Dans ce sens Avai se prépare actuellement pour obtenir la norme ISO 9001 d’ici la fin de l’année. Le club pourrait ainsi devenir le premier club brésilien à obtenir cette norme pour l’ensemble de ses services [6].
Que pensez-vous de ces initiatives ? Selon vous, comment des clubs français pourraient développer leur marque à l’étranger ?
Merci à Misaki Tsuruta pour sa disponibilité. Vous pouvez consulter sur la page Facebook de SPORTBIZinside des photos d’Avai et de Florianópolis.
Vous pouvez consulter la deuxième partie de cet article ici